Dans la soirée du 22 août 1914, un avion allemand survolant Torcy lança une bombe sur les jardins de la gare, manquant probablement son objectif. Deux jours plus tard, la dernière compagnie restée sur place se mit à l'œuvre pour exécuter les travaux de défense. Les soldats élevèrent des barricades. La première, établie sur le pont de Torcy était orientée de façon à pouvoir tirer en direction de la place Turenne. Les uhlans s'étaient répartis sur toutes les voies, sur les chemins, ruelles et sentiers. Le 25 août, leur arrivée fut signalée à peu près à la même heure de tous les côtés de la ville. Les premiers s'avancèrent lentement sur l'avenue, explorant du regard les maisons et les rues, tandis que les balles sifflaient depuis le pont de la gare. Puis les mouvements s'accélèrent et anxieux, avec des gestes brefs, les suivants tirèrent de tous côtés sans arrêt. Leur reconnaissance terminée, les uhlans remontaient la rue de Nassau lorsqu'en descendit l'infanterie allemande qui s'était divisée en trois colonnes pour se jeter dans Sedan par trois points différents : Balan, le Fond-de-Givonne et le chemin de la Garenne. Des assauts meurtriers ensanglantèrent la ville durant plusieurs jours, dans les différents quartiers. Les compagnies françaises défendirent la cité avec héroïsme, mais les patrouilles allemandes devinrent de plus en plus nombreuses. Il n'y avait plus personne pour entraver leur marche. Le jeudi 27 août, les Allemands envahirent Sedan. Ils allaient et venaient par les rues, évitant d'abord tout contact avec la population, puis ils montrèrent une certaine bienveillance pour pénétrer dans les familles. Le lendemain, le duc de Wurtemberg entra à l'hôtel de ville accompagné de son officier d'ordonnance. Il déclara au maire prendre possession de la cité et lui présenta une réquisition de 200 000 francs en or, sous peine d'incendier la ville. Tous les habitants apportèrent leur obole et la somme fut rassemblée en quelques heures. Le docteur Molard et l'auteur furent réquisitionnés pour soigner les blessés allemands tandis que les soldats français criaient leur douleur et leur détresse dans les champs de Wadelincourt. Quelques jours après l'installation des Allemands à Sedan, les habitants se sentaient prisonniers dans leur propre ville. Il leur était interdit de sortir de la cité et d'écrire la moindre lettre. S'ils étaient surpris lisant un journal français abandonné par un officier, ils étaient passibles de prison ou d'amendes. A sept heures du soir, le couvre-feu commençait. S'installait alors « le silence lugubre d'une cité morte ».