René Daumal avait trente ans, on ne connaissait de lui que quelques textes, quelques poèmes publiés çà et là, lorsque Jean Paulhan révéla, en 1938, dans la collection Métamorphoses, son premier livre: La Grande Beuverie ; premier livre qui est aussi un jugement dernier, un voyage au profond de soi, un grand balayage, un apologue initiatique et un pamphlet burlesque, une quête de l'absolu et un jeu de massacre : un nouveau voyage de Gulliver écrit par un soufi.
C'est au nom d'une sagesse intérieure que l'auteur a poursuivie jusqu'à la mort, après avoir abandonné les chemins périlleux de l'illumination par les drogues pour ceux de l'ascèse guidée que le monde des Faux-Semblants est ici pulvérisé, avec un humour sauvage et avec la verve visionnaire d'un Rabelais initiatique.
Les Fabricateurs, les Explicateurs, les Pwatts, les Krittiks, les Scients, les Sophes, tous ceux dont la loi est de «Faire sans savoir et savoir sans faire» défilent et s'anéantissent sous nos yeux dans le fracas d'explosion d'un rire radical.